4 avril, à 22:20 Auteur : Abdelmajid BAROUDI/ Bonne lecure
L’enseignement que l'on peut tirer de l’affaire MALI ( Mouvement Alternatif pour les Libertés Individuelles) réside dans le fait que cet événement remet en question le positionnement de la religion par rapport à la constitution, le rôle que devraient jouer ceux qui prétendent être modernistes sans le démontrer et enfin la problématique de la laïcité entant que notion dont la portée est parfois conjuguée au mépris de la religion.
Dans une interview accordée au Journal HEBDOMADAIRE No 410, Michèle Zirari, en réponse à une question sur la discordance de l’article 222 de la constitution avec les libertés individuelles, a expliqué la problématique liée à la religion et à l’exercice du culte musulman. « Vous savez que vous n’avez pas le droit au Maroc de dire « je ne suis pas musulman ». Pourquoi ? Parce que vote père est musulman ».
Le fait de ne pas avoir le droit de dire qu’on n’est pas musulman parce que son père l’est, représente une anomalie dans la perception de la notion de culture et celle de la nature. D’où l’incompatibilité des lois restrictives de la liberté individuelle, notamment l’article 222 avec la déclaration des Droits Humains qui stipule que les gens naissent libres.
Être ou ne pas être musulman ne relève pas du biologique. Renvoyer la conscience ou la confession au lien parental c’est en quelque sorte adapter l’inadaptable en transposant la culture, l’acquis à la nature, l’innée. Autrement dit : Est-ce qu’on nait juif, chrétien ou musulman, ou même athée ?
La religion fait partie d’un réseau moral qu’on apprend par le biais de l’éducation. Prétendre que la confession est d’ordre biologique, héritée par le lien paternel est contraire à la notion d’acquisition dont la religion représente une composante d’un tissu culturel complexe.
En dépit de la difficulté matérielle de discrimination ente la nature et la culture, Claude Levis Strauss propose une méthodologie qui permet d’élucider les caractéristiques des deux concepts constituants la nature humaine. Il s’agit de la Règle et de l’Universel. Ce qui fait que tout ce qui est Universel appartient à la nature. En revanche, chaque fois que la Règle émerge, on est sans doute au stade de la culture. Du coup, la Règle est variable du moment qu’elle sert de discrimination culturelle entre les collectivités tandis que l’Universel, biologiquement parlant, est constant, dans la mesure où il représente les caractéristiques communs de la nature de l’individu.
S’agissant du culte ; puisqu’il est soumis à la Règle, on est dans la culture au sens variable du terme. Au final la religion n’est pas assujettie à l’héritage biologique. D’autant plus que la liberté de conscience résulte d’un choix conformément à la notion de la culture. Laisser le choix à l’individu de croire est à mon avis, marquer la différence culturelle laquelle ne peut être que bénéfique pour le développement de la collectivité. Et c’est à l’école d’accomplir ce rôle civique.
Le fait de considérer que la confession est un acte culturel puisqu’il relève de l’acquis nous renvoie à la question de la laïcité. Force est de constater avec Henri Pena - Ruiz que « la laïcité est un principe de droit politique. Le mot qui désigne le principe. En Grec Laos, telle qu’elle se comprend, dés lors qu’elle se fonde sur trois exigences indissociables : la liberté de la conscience, la liberté des citoyens quelles que soient leurs convictions spirituelles, leur sexe ou leur origine, et la visée de l’intérêt général du bien commun à tous, comme seule raison d’être de l’Etat. »
Il est clair que la notion de laïcité entant que facteur unificateur des citoyens demeure dans la raison d’être de l’Etat, lequel doit être le garant de la pluralité engendrée par le Laos. Cette pluralité s’exprime par la liberté de conscience. En d’autres termes ; chaque citoyen est libre de choisir sa conviction spirituelle, tout en respectant la différence dans l’unité et le choix d’autrui qui favorise la cohabitation du Laos avec la pluralité. Ceci contribue au renforcement de la raison d’être de l’Etat, synonyme d’objectivation de l’intérêt général et à la consolidation de la primauté du Droit.
Toute fois, toute perception de la liberté de conscience qui croit en une seule vérité et lui assigne un sens projecteur d’un discours pariant sur un imaginaire social démuni du questionnement et incapable de tailler le concept, écorne l’universalité Humaine du Droit entant que garant de la multiplication du choix et fait perdre « la souveraineté de chaque homme sur ses pensées ».
La tolérance ne peut être à mes yeux perçue qu’en relation avec la liberté, sinon on risque davantage de la fragiliser. Il s’ensuit que « la tolérance reste en position d’infériorité par rapport à ce qui est donné comme norme », dans la mesure où cette tolérance dépend du tempérament de l’autorité qui prescrit les normes du culte dominateur. La tolérance dans ce cas revêt une forme de pardon exprimant une certaine « souplesse » passagère de la part des détenteurs du pouvoir politico-religieux vis-à-vis d’un acte ou idée qui risquent de nuire au sacré. Du coup la tolérance reste en deçà de ce qui est donné comme norme, pour paraphraser Henri Pena-Ruiz.
En revanche, le respect de l’égalité des citoyens dans le pluralisme spirituel qui n’est autre que le renforcement de la liberté, préserve la tolérance non seulement comme disposition éthique à l’écoute et au dialogue mais aussi comme disposition juridique dont l’Etat est l’assureur du Droit à la différence et au pluralisme culturel. Seule l’uniformité favorise le désordre et susceptible d’alimenter l’imprévisible. La tolérance ne peut donc évoluer qu’au sein de la laïcité qui n’est pas, encore une fois, contraire à la liberté de conscience que l’Etat de Droit doit sauvegarder.
-Pour le partage du savoir -Abdelmajid Baroudi
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