mardi 30 mars 2010

Religion et sexualité

Religion et sexualité
Roger Lussier et Guy Ménard

La question des rapports entre la religion et la sexualité ne constitue pas, à proprement parler, un champ d’étude que l’on pourrait aisément identifier comme tel dans la recherche québécoise. On considérera plutôt ici, sous cette rubrique, un assemblage d’approches et de travaux assez disparates, mettant en corrélation ces deux réalités — elles-mêmes susceptibles de compréhensions très diversifiées, on le sait, aussi bien dans leur définition que dans leur extension. En outre, les questions qui s’y trouvent abordées confinent souvent aux préoccupations de la morale ou de l’éthique. Ces dernières ne faisant cependant pas, comme telles, l’objet du présent ouvrage, on n’y référera dès lors que dans la mesure où elles demeurent liées à des considérations expressément religieuses (théologiques ou autres)1. On comprendra que, cela étant, des choix ont dû être faits, assurément discutables, mais qui ont néanmoins tenté d’identifier les « lieux » les plus significatifs de la recherche québécoise des dernières décennies associant de quelque manière, dans leur questionnement central, les dimensions religieuse et sexuelle de l’expérience humaine.

Dans le cas du Québec, et comme pour beaucoup d’autres dossiers abordés par ce collectif, on ne s’étonnera guère de retrouver tout d’abord la sexualité sous le regard de la théologie, plus précisément de la théologie morale, mais également de ses prolongements pastoraux (auxquels on réfère plus volontiers aujourd’hui sous le nom de « théologie pratique »). À ce chapitre, on s’arrêtera surtout aux contributions de deux théologiens moralistes qui ont occupé une place importante dans l’enseignement et la recherche universitaire pendant de longues années : Guy Durand (U. de Montréal) et le regretté André Guindon qui, bien qu’ayant exercé la plus grande partie de sa carrière à l’U. Saint-Paul d’Ottawa, a été suffisamment présent dans la réflexion et les débats québécois pour qu’il paraisse justifié de l’inclure ici. Ces deux figures présentent en outre l’intérêt d’offrir des perspectives assez différentes eu égard à une morale chrétienne de la sexualité. La recherche menée il y a quelques années par Jean-Guy Nadeau2, sur la prostitution, et celle à laquelle il a collaboré dans les années quatre-vingt-dix avec Manon Jourdenais, sur l’expérience spirituelle d’homosexuels vivant avec le VIH/sida, ont paru pour leur part offrir d’intéressants exemples de visées plus pastorales dans des secteurs directement concernés par l’expérience de la sexualité.

Les historiographes du Québec ont par ailleurs souvent croisé dans leurs investigations — et signalé dans leurs travaux — l’existence d’un lien étroit entre les moeurs sexuelles de la société canadienne-française et l’omniprésence de la religion catholique (mais aussi, protestante, du côté de la minorité anglophone). S’il est impossible d’envisager une recension exhaustive des recherches qui se sont de quelque manière arrêtées à ces relations dans notre histoire, on en signalera tout au moins quelques-unes qui les ont abordées de manière privilégiée.

Dans un tout autre ordre d’idées, on sait que le mouvement féministe a eu un impact considérable, au Québec, sur la conscience de bien des femmes croyantes, y compris — et peut-être même en premier lieu — sur des questions étroitement liées à la sexualité (avortement, contraception, mais aussi attitudes sexistes des institutions religieuses, etc.). Pour rendre compte de ce volet, il est apparu opportun de privilégier une publication qui, depuis un quart de siècle, a constitué le principal forum du féminisme chrétien au Québec : la revue L’Autre Parole, dans laquelle se sont exprimées, au fil des ans, les principales chercheures québécoises ayant abordé de quelque manière la question qui nous intéresse ici. On se limitera bien sûr à ce seul aspect des choses, la question plus vaste des rapports entre femmes, féminisme et religion faisant l’objet d’un autre article de ce collectif.

L’homosexualité, par ailleurs, depuis une vingtaine d’années, a pour sa part été le thème central d’études limitées mais significatives, qui ont notamment poursuivi l’objectif de revoir radicalement les positions traditionnelles du christianisme et, singulièrement, celles de l’Église catholique, encore lourdement réaffirmées par le magistère de Jean-Paul II. On signalera ici les principaux jalons de ces travaux à maints égards pionniers.

Dans des perspectives cette fois plus socio-anthropologiques — ou religiologiques —, et dans la mouvance des recherches sur les déplacements du sacré (voir l’article sur ce thème), la sexualité, dans la diversité de ses manifestations actuelles en Occident, a été explorée, notamment par Guy Ménard, comme l’un des lieux vers lesquels se seraient déplacées la quête de sens et l’expérience du sacré, pour nombre de nos contemporains, dans la foulée de la « libération sexuelle » de l’après-guerre. Plus sociologique, la thèse de Jean-Marc Larouche sur l’émergence de la sexologie et des études sur la mort, au Québec, fait pour sa part apparaître la sexualité « sous le regard de nouveaux clercs » des sciences humaines universitaires.

Bilan

Sexualité et théologie morale

Dans la seconde moitié des années soixante-dix, le théologien et bioéthicien Guy Durand, pendant longtemps professeur à la faculté de théologie de l’U. de Montréal, a proposé une synthèse de théologie morale de la sexualité chrétienne. Dans Sexualité et foi (1977), Durand aborde diverses questions (vie conjugale, masturbation, homosexualité, relations hétérosexuelles hors mariage, régulation des naissances, célibat chrétien, etc.) et tente d’y « démêler » ce qu’il considère comme le « sens chrétien » de la sexualité. Pour Durand, la morale sexuelle consiste essentiellement à rechercher le sens humain de la sexualité et à s’efforcer de le vivre. Mais, reconnaît-il, en une expression qui revient fréquemment dans sa réflexion, « cela n’est pas facile » : d’une part parce que la sexualité est « difficile », « conflictuelle » et « ambiguë » ; d’autre part, parce que la société moderne et ses valeurs ne favorisent pas nécessairement la rencontre et l’accueil personnel de l’autre ainsi que l’exige la rencontre sexuelle à l’intérieur d’un projet amoureux. Bref, pour Durand — chez qui on s’empêche difficilement de repérer au moins une pointe de pessimisme augustinien —, la sexualité est difficile à humaniser. Pour que celle-ci soit « intégralement humaine », le moraliste croit qu’elle ne doit pas être un lieu de « fermeture sur soi » et d’«exploitation de l’autre ». Au contraire, elle doit plutôt favoriser « l’ouverture » et la « communion » à l’« altérité » de l’autre. Afin de favoriser cette humanisation de la sexualité, Durand propose de retrouver la valeur de l’héritage chrétien dans lequel l’amour correspond à accueillir l’autre comme « liberté », « projet », « citoyen », et rechercher sa « promotion ». En outre, la rencontre sexuelle, pour être pleinement humaine, doit s’inscrire dans un « projet d’amour » — c’est-à-dire, pour le théologien, dans un projet « d’exclusivité », de « fidélité » et de « fécondité » qui appelle résolument, selon lui, le « projet-mariage ». C’est à ces valeurs que Durand se propose d’éduquer (voir plus précisément, en ce sens, Durand, 1985), par le biais de la théologie morale de la sexualité qu’il met en avant et qu’on pourrait résumer ainsi : la sexualité est un « appel de Dieu », le comportement sexuel est une réponse à cet appel, et le but ultime de la rencontre sexuelle, c’est la « sainteté » ou l’union à Dieu.

Pour André Guindon, décédé prématurément au début des années quatre-vingt-dix, les choses se présentent de manière assez différente. Pour lui, la question de la fécondité est la plus importante et la plus débattue de l’éthique sexuelle contemporaine. Dans un ouvrage controversé paru en 1986 — The Sexual Creators —, le théologien et chercheur propose une notion de « fécondité sexuelle » renouvelée (fécondité-plus-que-fertilité), plus « englobante », à l’intérieur de laquelle l’ensemble de la personne humaine sexuée est considérée, et non seulement sa génitalité (fécondité-fertilité). Cette notion n’exclut pas la fertilité, mais elle élargit le concept de fécondité sexuelle.

Selon le moraliste, la position traditionnelle de « fécondité-fertilité » maintenue par l’Église catholique a tendance à dicter des critères de conduite qui tiennent plus ou moins compte de la réalité contemporaine. Pour Guindon, la notion de fécondité sexuelle ne peut plus correspondre à la seule notion de fertilité dans le but de la procréation. Dès lors que, dans un tel cas, la sexualité ne serait possible qu’à l’intérieur du mariage sacramentel, toutes les formes de relations sexuelles ayant d’autres finalités n’auraient pas de sens. Bref, elle n’est tout simplement pas représentative de l’ensemble du vécu sexuel contemporain. En remettant ainsi en question le critère traditionnel de la morale sexuelle, Guindon invite à une compréhension plus large de la sexualité, où la personne sexuée devient l’élément central. En outre, il propose de considérer d’une part les individus comme étant responsables et autonomes et, d’autre part, le vécu de ceux qui cherchent à découvrir le sens de leur vie sexuelle. En d’autres mots, le théologien invite l’Église à être davantage en lien avec la réalité humaine qu’à lui imposer des lois qui lui sont largement étrangères. Et, afin que chaque personne puisse trouver un sens à sa sexualité, Guindon propose que la sensualité et la tendresse soient intégrées à la sexualité, que celle-ci soit considérée comme le langage de l’intimité humaine, que l’amour soit le lien entre les individus, que la sexualité soit contextualisée et responsable, de sorte que le concept de « fécondité sexuelle » ne se limite plus à la seule génitalité mais qu’il puisse inclure celle-ci dans une expérience beaucoup plus vaste, intégrant tous les aspects de la sexualité humaine.

Rappelons enfin que la proposition éthique d’André Guindon a fait l’objet de vives préoccupations du magistère catholique. Dans une note du 29 janvier 1992, la congrégation pour la Doctrine de la foi lui a demandé « d’exposer et de confirmer le sens » de trois de ses positions concernant respectivement sa fidélité à la tradition catholique, la fonction du magistère dans l’éthique catholique, et l’usage de la fonction sexuelle dans le seul cadre du « mariage véritable ». Guindon s’en est expliqué l’année suivante (Guindon, 1993), peu de temps avant sa mort.

Sexualité et théologie pratique


De 1971 à 1979, une travailleuse sociale ouvre son logement à des femmes qui vivent de la prostitution et en sont socialement stigmatisées. Elles s’y rassemblent régulièrement avec un groupe de chrétiennes et de chrétiens intéressés à faire Église avec elles. Des femmes prostituées ont pu s’y rencontrer entre elles hors de leur occupation, partager une expérience qui doit se taire partout ailleurs, rencontrer des gens qui ne prétendaient pas les utiliser, les juger ou les réformer. Plusieurs y ont trouvé un support moral ou technique, d’autres enfin ont pu y découvrir un visage de l’Église ou du Dieu de Jésus-Christ, qui leur était jusqu’alors inconnu ou interdit. (Nadeau, 1987, p. 11)

C’est par ces mots — ils donnent déjà le ton général de l’ouvrage — que s’ouvre la thèse doctorale de Jean-Guy Nadeau, dans sa version publiée en 1987, thèse consacrée à une réflexion sur ce que son auteur insiste pour appeler la « pratique prostitutionnelle », avec le souci de ne pas occulter le fait que la réalité du phénomène ne concerne pas seulements les prostitué(e)s (femmes ou hommes) mais implique aussi bon nombre d’autres « intervenants » — du client à l’État, en passant par le discours et la pratique de l’institution ecclésiale. Cette recherche s’enracine dans les perspectives fécondes de la praxéologie pastorale, élaborée à la faculté de théologie de l’U. de Montréal au cours des années soixante-dix (notamment autour de Michel-M. Campbell, Jacques Grand’Maison, Pierre Lucier et Jean Martucci) et se centre sur une expérience pastorale d’accueil de femmes prostituées, échelonnée sur plusieurs années. L’originalité principale de la thèse de Nadeau consiste sans doute à manifester une grande ouverture aux sciences humaines mais peut-être d’abord et avant tout une écoute de l’expérience et de la parole des femmes concernées. Pour Nadeau, c’est « de nous et de notre rapport à l’autre que parle la prostitution » mais, dans une perspective croyante, c’est également « de notre rapport à la Parole et au Corps du Christ ».

Collaborant à un ouvrage de Manon Jourdenais (1998) portant sur l’accompagnement des hommes homosexuels atteints du VIH/sida, Nadeau a par ailleurs aussi abordé la question de la souffrance et de la spiritualité de ces hommes. Après avoir observé le vécu spirituel d’homosexuels vivant avec le VIH/sida, il propose une lecture spirituelle de cette expérience marquée par la souffrance. Ce livre, qui se présente essentiellement comme un guide à l’usage des bénévoles accompagnateurs, établit finalement assez peu de liens entre l’expérience spirituelle des personnes concernées et leur expérience de la sexualité, insistant plutôt sur la valeur chrétienne de la souffrance comme occasion de croissance spirituelle.

Homosexualité et théologie chrétienne

Dans son mémoire de maîtrise en théologie (U. de Montréal, 1979) publié en 1980 et réédité en 1983 sous le titre De Sodome à l’Exode3, Guy Ménard propose une certain nombre de jalons en vue de ce qu’il appelle une « théologie de la libération gaie »4. Il s’inspire, pour ce faire, des perspectives théoriques et méthodologiques de la théologie de la libération qui, d’origine latino-américaine, eut un impact considérable dans les milieux théologiques progressistes, y compris au Québec. Empruntant au théologien uruguayen Juan Luis Segundo sa méthode herméneutique, Ménard enregistre en premier lieu l’émergence d’un vaste et vigoureux mouvement de libération gaie dans le monde occidental, au début des années soixante-dix. Ce mouvement s’est déployé dans la foulée d’autres mouvements de libération analogues — notamment ceux des femmes et des peuples du tiers-monde. Selon la perspective herméneutique de la théologie de la libération, c’est dans cette praxis multiforme de libération elle-même que doit s’insérer la réflexion de l’expérience croyante. Seule, en effet, une réflexion théologique faite du point de vue de l’expérience libératrice des gais et des lesbiennes est susceptible de faire émerger une nouvelle compréhension chrétienne de l’homosexualité, au-delà de sa condamnation par des siècles d’oppression qui la tinrent pour un péché si horrible que même « son nom ne devait pas être prononcé parmi les chrétiens » (inter Christianos non nominandum).

Un tel projet guide Ménard dans une double démarche : d’une part, revoir critiquement les sources scripturaires, patristiques et théologiques de l’attitude séculaire du (judéo)christianisme à l’égard des pratiques homosexuelles ; d’autre part, relire les fondements du christianisme à la lumière de l’expérience contemporaine des hommes et des femmes engagés dans tous les aspects, individuels et collectifs, du processus de la libération gaie. La première de ces démarches en arrive à mettre en lumière le fait que la plupart des interprétations chrétiennes de l’homosexualité, lourdement tributaires de contextes socio-culturels historiquement situés et datés, sont difficilement tenables aujourd’hui, aussi bien au regard de l’exégèse biblique qu’à celui des sciences humaines5. Dans le second volet de sa thèse, Ménard avance un certain nombre de pistes en vue d’une réinterprétation nettement plus positive de la réalité homosexuelle selon une perspective biblique qui interpelle l’ensemble de la communauté chrétienne. Cette réflexion originale et à maints égards pionnière a eu un impact non négligeable au Québec aussi bien qu’à l’étranger, en particulier au Brésil (Ménard, 1980) et aux Pays-Bas où elle a inspiré des travaux dans sa mouvance (Ménard, 1989a ; Ménard et al., 1989).

Pour diverses raisons dont l’élucidation commanderait un texte plus long que celui-ci, cette percée de la réfléxion théologique sur la question homosexuelle n’a toutefois pratiquement pas eu de suites dans la recherche universitaire québécoise6. Il faudra en fait attendre une vingtaine d’années avant qu’un autre chercheur, Réjean Bisaillon, reprenne ce dossier, à travers une thèse de théologie morale (U. de Montréal, 1999). Cette thèse, qui s’inspire entre autres largement des travaux de Ménard et qui affirme également se situer dans la mouvance de la théologie de la libération, n’innove guère au plan théorique mais elle met opportunément l’accent sur une problématisation éthique de la question homosexuelle — que Ménard lui-même avait délibérément évité d’aborder, notamment pour des raisons d’ordre conjoncturel7. Divers facteurs ont toutefois contribué, au cours des dernières décennies du XXe siècle, à mettre la question éthique davantage à l’ordre du jour. On y reviendra. À cet égard, il faut signaler la pertinence des préoccupations de Bisaillon qui, en collaboration avec Guy Lapointe (théologie, U. de Montréal), organisait en 1996 un important colloque sur la dimension éthique de l’expérience homosexuelle. Ce colloque a donné lieu à la publication d’un collectif (Lapointe et Bisaillon, 1997) aux contributions diversifiées. Signalons, parmi les plus significatives pour ce qui nous concerne davantage ici, celles de Bisaillon lui-même, qui énonce un certain nombre de problèmes théoriques et méthodologiques en rapport avec l’étude de la question, de Pierre Pelletier, qui y propose une réflexion d’inspiration psychanalytique, du théologien Michel Séguin, qui rappelle les positions actuelles du magistère catholique par rapport à l’homosexualité, ainsi que de Gregory Baum8, qui évoque la problématique de l’ordination des gais et des lesbiennes dans l’Église Unie du Canada.

Sexualité et religion dans l’historiographie québécoise

On se souviendra peut-être de l’essai de Robert-Lionel Séguin publié au début des années soixante-dix sur la « vie libertine » en Nouvelle-France, au XVIIe siècle. À partir d’affaires « de moeurs » portées devant les tribunaux de l’époque, l’historien avait donné des débuts de la colonisation française en Amérique une image parfois assez « croustillante », dans laquelle certains n’ont d’ailleurs pas manqué de repérer peut-être davantage les hantises du Québec des années soixante que les obsessions propres aux premières décennies de la Nouvelle-France... L’historien Serge Gagnon a pour sa part consacré plusieurs travaux à l’étude des rapports entre les moeurs sexuelles du Québec traditionnel et le paysage religieux dominé par l’institution catholique (Gagnon, 1990). On lui doit notamment une étude sur le sexe et la confession dans le Bas-Canada de la première moitié du XIXe siècle. Gagnon, à la suite de J.-L. Flandrin — pionnier de ce type de recherches —, reconnaît qu’en l’absence de documentation élaborée et, a fortiori, de statistiques significatives, il n’est pas évident de brosser un tableau absolument net de la « culture sexuelle » du Québec prémoderne. Il s’y emploie néanmoins, notamment à l’aide de la correspondance pastorale du clergé rural de l’époque, et fait entre autres choses ressortir un trait non négligeable du catholicisme, y compris dans sa version canadienne-française : le fait d’avoir imposé à la masse des fidèles, avec la confession, un remarquable dispositif de contrôle. Voilà pourquoi, selon lui, « l’histoire de la diète sexuelle catholique est inséparable d’une étude de la confession sacramentelle » (Gagnon, 1990, p. 5). L’étude de Gagnon ne manque certes pas de souligner les contradictions — parfois considérables — entre la morale prêchée par les clercs et les moeurs sexuelles réelles des paysans canadiens-français du XIXe siècle. Il n’estime pas moins que l’entreprise de christianisation des campagnes du Bas-Canada a fort bien réussi dans l’ensemble. Cela ne signifie certes pas « que les fidèles aient renoncé aux plaisirs interdits mais (…) ils se reconnaissent volontiers coupables de leurs défis à l’ordre sexuel chrétien (…) ». Par conséquent, de conclure Gagnon, « l’histoire de la sexualité, en terre catholique, est celle du sentiment de culpabilité exprimé dans le sacrement des aveux »9.

Sexualité, religion et féminisme

Les rapports entre la religion et la sexualité touchent également les femmes de très près. Au cours des dernières décennies, bon nombre d’entre elles se sont beaucoup préoccupées de l’attitude répressive de l’Église à leur endroit, notamment autour des questions impliquant leur corps.10 Plus particulièrement, les femmes se sont appliquées à dénoncer l’attitude sexiste de l’Église à leur égard, et à se réapproprier leur corps. Ce combat des femmes est notamment repérable dès les premiers numéros de la revue L’Autre Parole, principal organe de communication et d’animation11 de la mouvance féministe chrétienne québécoise, fondée en 1976. Revue d’abord et avant tout militante, sans prétentions « académiques », L’Autre Parole n’en a pas moins accueilli, au fil des ans, les principales représentantes de la recherche féministe québécoise intéressée par des questions religieuses, éthiques et théologiques12. Dans ces pages, les femmes reconnaissent que c’est autour de leur corps que réside le fond du problème de leurs relations avec l’Église. Un thème important de la revue sera donc « le corps de la femme dans l’Église ». Pour Marie-Andrée Roy, co-fondatrice de cette « collective » (selon l’expression souvent utilisée par les féministes elles-mêmes), la réappropriation de leur corps est, pour les femmes, une démarche essentielle et fondamentale pour leur libération comme — dans les milieux où cette préoccupation existe — pour la production d’une théologie féministe. Les femmes vont donc s’occuper d’identifier les oppressions qu’elles subissent dans l’Église, dont l’oppression sexuelle. Elles vont dénoncer notamment le rôle sexuel passif qui leur a été largement imposé, le fait que leur corps soit considéré comme un objet de procréation et non de jouissance, le pouvoir de l’homme sur leur corps, l’hypervalorisation de la virginité prémaritale ainsi que le caractère abstrait de la conception de la vie telle qu’on la retrouve dans un certain nombre de discours ecclésiastiques13. Elles vont également tenter de trouver dans la tradition chrétienne des éléments qui viennent répondre aux oppressions qu’elles subissent et dénoncent. Bref, les femmes tentent de mettre en déroute le sexisme de l’Église.

Le combat des femmes pour la réappropriation de leur corps concerne également de près la question de leurs droits. Dans un ouvrage paru en 1992, la théologienne Monique Dumais précise qu’une des revendications prioritaires des femmes est celle du contrôle de leur propre corps. L’autonomie revendiquée est multiple et touche à la fois leur santé, leur sexualité, leur fécondité et l’intégrité de leurs corps. La responsabilité qu’elles réclament, soutient la théologienne, devrait leur permettre d’être autonomes face à la régulation de leur fécondité (contraception), au contrôle de leur maternité (avortement), comme face aux « nouvelles techniques de reproduction ». Bref, les femmes se perçoivent comme un tout responsable et autonome et, par conséquent, revendiquent le droit de disposer librement de leur corps. En outre, elles envoient un message clair à l’Église à l’effet qu’elles entendent poursuivre leur libération, celle de leur corps notamment, malgré le peu d’ouverture que l’institution manifeste à leur égard.

Sexualité, déplacements du religieux et du sacré

Dans des perspectives cette fois plus anthropologiques et religiologiques que théologiques, Guy Ménard a également déployé, au fil des années, une autre piste de recherche liant religion et sexualité. S’inscrivant dans l’hypothèse générale des déplacements (de l’expérience) du sacré, Ménard en est ainsi venu à s’intéresser au vécu actuel de la sexualité dans l’Occident contemporain comme vecteur potentiel d’une authentique expérience contemporaine du sacré (Ménard, 1990, 2000) et, à travers certaines de ses figures particulières (fétichisme, sexualité anonyme et ludique, sensualité rave, etc. — voir Ménard, 1999), comme lieu possible d’une véritable quête contemporaine de la transcendance dans un monde marqué par les mutations de la postmodernité. En une formule imagée et frappante, Ménard avance ainsi que « tout semble s’être passé comme si l’Occident contemporain avait passionnément demandé au sexe à peu près exactement (…) ce que d’autres époques avaient tout aussi passionnément attendu de la mystique, de l’extase liturgique ou de la prière : “s’envoyer en l’air”… » (Ménard, 1995a, p. 67) Ce faisant, Ménard retrouve d’une certaine manière les très anciennes complicités que l’histoire atteste entre la religion et la sexualité humaine14, en partie occultées en Occident par des siècles de dualisme grec et de spiritualisme chrétien. Ces perspectives ne sont pas non plus sans évoquer les questionnements de Michel Foucault dans le premier tome de son Histoire de la sexualité, lorsque celui-ci se demande par exemple (1976, p. 15) « comment il a pu se faire que le lyrisme, que la religiosité qui avaient accompagné longtemps le projet révolutionnaire se soient, dans les sociétés industrielles et occidentales, reportés, pour une bonne part au moins, sur le sexe ». Ménard rejoint également à cet égard des méditations modernes comme celles du philosophe Georges Bataille, sur la dimension religieuse de l’érotisme et, dans un registre différent, les analyses plus contemporaines d’un Michel Maffesoli sur l’orgiasme comme « facteur de socialité » et « reliance » de l’être-ensemble (Maffesoli, 1982).

Dans sa thèse de doctorat (U. d’Ottawa) publiée en 1991, Jean-Marc Larouche propose pour sa part une lecture originale de certaines transformations importantes de la culture québécoise des dernières décennies autour de ces deux « objets » majeurs que sont éros et thanatos, la sexualité et la mort. Sa sensibilité épistémologique et sa méthode apparentent son entreprise à une sociologie de la culture, de la religion et de l’éthique. Larouche s’interroge en somme sur ce qui s’est produit lorsque ces deux réalités, longtemps enserrées dans les codes des institutions religieuses, sont passées, à travers le processus de sécularisation, dans l’orbite de nouveaux discours et de nouvelles pratiques : ceux des regards disciplinaires (relativement) nouveaux que sont la sexologie et les études sur la mort, notamment dans leur enracinement institutionnel à l’U. du Québec à Montréal. Il met en lumière l’émergence de ce qu’il appelle un « nouveau paradigme », celui de la postsécularisation, dans lequel les sciences humaines (notamment la sexologie, pour ce qui nous concerne ici davantage), loin d’avoir enfoncé le clou de la sécularisation, auraient au contraire plutôt participé à la mise en place d’une nouvelle « religion savante » dont le contenu éthico-religieux s’articulerait autour de deux piliers : l’éthique de l’altérité et la quête de sens15. Par là, et bien que tel n’ait pas été son projet explicite, on peut néanmoins avancer que Larouche illustre lui aussi, à sa manière, la thèse des déplacements du religieux et du sacré dans la société et la culture actuelles.

Pistes prospectives

On comprendra sans peine que le caractère très diversifié du bilan qui vient d’être dégagé rende assez téméraire toute entreprise de prospective d’ensemble — d’autant que ses auteurs sont inégalement familiers avec les champs d’études recensés ici. C’est donc avec prudence et modestie que l’on mettra de l’avant quelques idées en vue de l’avenir de ce domaine de recherche.

Cela dit, il n’est pas nécessaire d’être grand clerc pour constater, en premier lieu, que la conjoncture du magistère catholique, en ce tournant de millénaire, ne favorise guère une recherche théologique audacieuse sur des dossiers aussi « chauds » que la plupart de ceux qui sont de quelque manière reliés à la sexualité — comme le regretté André Guindon, entre autres, l’expérimenta à ses douloureux dépens naguère encore. On peut d’ailleurs se demander si une telle conjoncture n’explique pas au moins en partie la relative timidité de la thèse doctorale d’un Réjean Bisaillon sur l’éthique homosexuelle, dans la mesure où celle-ci fait encore une large place à des auteurs et à des approches dont le moins qu’on puisse dire est qu’ils cadrent peu avec les perspectives « de libération » dont cette thèse affirmait s’inspirer. La préoccupation de celle-ci pour la dimension proprement éthique de la réflexion théologique sur l’expérience homosexuelle marque certes une avancée intéressante par rapport aux travaux de Guy Ménard qui, dans les années soixante-dix, et pour des raisons déjà évoquées, ne s’y était pas vraiment aventuré lui-même. Les dernières décennies du XXe siècle ont cependant fait considérablement bouger les choses à ce chapitre, et l’on constate aujourd’hui, dans pratiquement tous les secteurs de la vie sociale et culturelle, une « demande d’éthique » qui ne cesse de croître. Ceci vaut aussi, bien sûr, pour l’expérience des gais et des lesbiennes, forte d’un quart de siècle de luttes et d’acquis du mouvement gai et trempée par deux décennies de réaction à la tragédie du sida. Les temps semblent donc avoir mûri en vue d’une véritable interrogation éthique de la condition homosexuelle — par rapport à laquelle les propositions de Bisaillon pourront toutefois paraître encore beaucoup trop marquées par un souci de légitimation intra-ecclésiale.

Dans cette veine, mais de manière plus large, on se prend bien sûr aussi à espérer des travaux qui, de quelque manière, reprendront le flambeau prématurément abandonné par André Guindon, et proposant des jalons en vue d’une éthique sexuelle chrétienne authentique, en lien avec le discours des sciences humaines et surtout, peut-être, à l’écoute de l’expérience contemporaine de la sexualité et de la dramatique humaine qui s’y joue de multiples manières. Si tant est, bien entendu, que la théologie veuille — ou puisse — encore se faire porteuse d’une intelligence de la foi chrétienne pertinente pour les hommes et les femmes de ce nouveau millénaire.

À cet égard, il tombe sous le sens que la richesse des années de luttes et de réflexions du féminisme québécois devrait offrir à cette recherche une contribution difficilement contournable. Force est cependant d’admettre que les thèmes les plus importants de cette réflexion de théologiennes féministes, depuis un quart de siècle, sont demeurés d’une certaine manière « en périphérie » de l’expérience « centrale » de la sexualité, mettant souvent davantage l’accent sur ses conditions de possibilité et d’exercice (contraception, nouvelles techniques de reproduction, etc.), sur certaines de ses « conséquences » déterminantes pour le vécu des femmes (grossesses non désirées, avortement, etc.) mais surtout peut-être sur la dynamique du pouvoir qui traverse celle-ci dans la société aussi bien que dans les institutions religieuses (harcèlement sexuel, sexisme, etc.). Nul, assurément, ne contestera la pertinence et l’importance de telles réflexions critiques. Celles-ci ont cependant en bonne partie orienté la recherche théologique féministe du côté de ce qu’il est désormais convenu d’appeler les catégories de « genre » davantage que vers celles qui cherchent à rendre compte de l’exercice même de la sexualité et des questions qui lui sont étroitement associées dans le contexte largement hédoniste de la société actuelle (le sens du plaisir, la séduction et ses stratégies, l’éthique de la rencontre sexuelle, mais aussi bien la prostitution, la pornographie, la sexualité « virtuelle », etc.). On peut également avancer que, dans une large mesure, la pratique militante du féminisme chrétien, au Québec, a avant tout été de l’ordre d’un « agir » — critique, contestataire et « alternatif » — encore en quête du « dire » qui l’expliciterait davantage.

Tant et si bien que l’on demeure encore dans l’attente de recherches qui, si l’on ose dire, aborderaient à bras le corps ce « noeud » particulièrement sensible de la tradition chrétienne — et, singulièrement, de celle du catholicisme —, dans la foulée de réflexions courageuses et inspirantes comme celles d’André Guindon et d’autres, entreprises ailleurs il y a déjà un bon moment (on songe par exemple aux travaux des théologiens français Jacques-Marie Pohier et Maurice Bellet).

Les recherches sur la sexualité comme vecteur d’une quête contemporaine de sens, de sacré et de transcendance, voire comme sphère d’une religiosité « implicite » dans la culture de l’Occident contemporain, paraissent pour leur part prometteuses, surtout à la condition de déboucher davantage sur des travaux plus empiriques. Jusqu’ici, en effet, les propositions mises de l’avant à ce chapitre, notamment par Guy Ménard, sont largement demeurées à l’état d’hypothèses et de pistes d’interprétation — qui gagneraient sûrement à subir l’épreuve de la validation sur le terrain. On constate cependant que ces pistes ont inspiré jusqu’à maintenant fort peu de recherches, étudiantes ou professionnelles. De même en est-il pour d’autres facettes encore pratiquement inexplorées de la question. On songe ainsi, entre autres, au vécu et à la signification de la sexualité dans plusieurs nouveaux groupes religieux, notamment dans la mouvance du Nouvel Âge ou de traditions religieuses orientales (par exemple, l’influence du néo-tantrisme, présent au Québec depuis plus de vingt ans)16. Mais on peut également penser au bousculement des valeurs et des pratiques liées à la sexualité qui accompagne vraisemblablement l’insertion québécoise de nombreux immigrants d’horizons culturels et religieux très normatifs en matière de sexualité (islam, hindouisme, etc.). Micheline Milot, dans des recherches récentes (1999), a interrogé de telles transformations par rapport à la question de l’identité. Mais on pourrait sûrement envisager avec profit des recherches plus pointues, à l’interface même de la sexualité, de la religion et du choc des cultures en présence.

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Inutile de dire que ces quelques évocations ne sauraient d’aucune manière prétendre épuiser les pistes de prospective possibles en ce qui concerne l’étude des rapports entre religion et sexualité. On peut à tout le moins espérer qu’elles donnent déjà à penser et puissent aussi en faire surgir de nouvelles.

Bibliographie

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1. Pour des raisons analogues, il n’a paru ni possible ni opportun d’étendre les visées de cet article à tout ce qui concerne l’étude des rapports entre la religion et le corps — et qui déborde évidemment la seule dimension de la sexualité. Voir néanmoins, sur ce thème, Despland, 1987.

2. Celui-ci travaille actuellement à une recherche sur les abus sexuels dans l’Église catholique. Voir déjà, à ce sujet, Nadeau, 1995.

3. Une première esquisse en avait été publiée deux ans plus tôt dans Sortir, un des premiers collectifs publiés au Québec sur la question homosexuelle (Basile et al., 1978).

4. La question des rapports entre homosexualité et morale chrétienne avait été pratiquement absente de la réflexion québécoise, jusque là, si l’on excepte une série d’articles — assez audacieuse dans le contexte — du P. Marcel Marcotte, s.j., parus dans la revue Relations (1976) et, dans une tout autre perspective, les réflexions de théologiens moralistes comme Guy Durand (1977), notamment.

5. Rappelons que le terme même d’« homosexualité » n’est apparu que dans la seconde moitié du XIXe siècle et que la notion d’« orientation sexuelle » ne s’est développée pour sa part qu’assez tard au XXe.

6. Voir tout de même, dans des perspectives assez différentes, la thèse — non publiée — de Pierre Hurteau (1991) sur l’homosexualité, la religion et le droit au Québec.

7. Celui-ci l’estimait entre autres choses prématurée dans un contexte qui commandait d’abord et avant tout, selon lui, un changement de la conscience chrétienne par rapport à l’homosexualité, préalable nécessaire à toute réflexion éthique réellement libératrice. Voir néanmoins, sur la dimension éthique de la question, Ménard 1988, 1989b, 1995a, 1995b, 1997.

8. Professeur émérite de la faculté des sciences religieuses de l’U. McGill, mais ayant passé la plus grande partie de sa carrière au St. Michael’s College de l’U. de Toronto, Gregory Baum a été l’un des premiers théologiens canadiens à proposer une lecture nouvelle de l’homosexualité (voir notamment Baum, 1974 ; voir également sa préface de Ménard, 1983).

9. Voir également, dans la veine historiographique, Gagnon, 1987 ; Blain, 1973 ; Cliche, 1988 ; Du Berger, 1980, ainsi que le numéro spécial (49) de la revue Cap-Aux-Diamants, 1997, « La sexualité — secrets d'alcôves et jeux interdits ».

10. Une étude plus longue que celle-ci aurait sûrement intérêt à montrer davantage comment la question des rapports entre religion et sexualité se pose de manière souvent très différente dans le contexte d’autres traditions du christianisme ou dans celui d’autres traditions religieuses. Voir par exemple, dans le cas du judaïsme, l’étude de Joseph-Josy Lévy et Jean-Marc Samson (1988).

11. Ainsi, par exemple, L’Autre Parole organisait, en juin 1992, une journée d’étude sur la situation des femmes oeuvrant dans l’Église qui rassemblait plus de 250 femmes de diverses confessions.

12. En particulier : Monique Dumais (U. du Québec à Rimouski), Marie Gratton-Boucher et Louise Melançon (U. de Sherbrooke) et Marie-Andrée Roy (U. du Québec à Montréal).

13. La section montréalaise du collectif L’Autre Parole a ainsi signé, avec d’autres groupes féministes militants, une lettre ouverte parue en 1981 (« La vie n’est pas un principe », Le Devoir, 11 décembre 1981) en réaction à la position exprimée par les évêques du Québec sur la question de l’avortement. Voir également le no 17 de L’Autre Parole (février 1982) ainsi que le no 33 (mars 1987) consacré à ce thème. Voir aussi les réflexions de Monique Dumais (1986) et de Louise Melançon (1981).

14. Voir entre autres le classique Éros et religion de Walter Schubart, 1972.

15. Signalons cependant que les études sexologiques, telles qu’elles se sont déployées en particulier à l’UQÀM depuis plus d’un quart de siècle, et à quelques exceptions près (certains travaux de Joseph-Josy Lévy, notamment), ont manifesté peu d’intérêt pour la question des rapports entre sexualité et religion.

16. Voir à ce sujet le mémoire de maîtrise de Nancy Shaink, 1998.

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